«J’avais cinq ans et je peignais avec la spontanéité qui caractérise celle des dessins d’enfant. Une des peintures avait attiré l’attention de mon père et il l’avait posée sur le siège avant de sa voiture. Elle représentait une sorte de paysage abstrait, esquissé par des teintes sombres – des bruns terre mouillée et des verts forêt de sapins –, construit sur un jeu de transparence qui superposait les couleurs et dessinait des formes par couches successives. Cette peinture n’avait pas de réelle existence pour moi, jusqu’au jour où je vis mon père la montrer à un de ses amis et lui dire qu’il était impressionné par la qualité artistique de mon œuvre. Ce jour-là, j’ai découvert la beauté. Dans les tracés qui me semblaient insignifiants, il y avait quelque chose de suffisamment beau pour être remarqué. Depuis ce jour, je recherche la beauté. Je bats le rappel du regard de mon père qui avait déterré le beau en moi et dans mon dessin. Depuis ce jour, ma quête est une quête de beauté.
Cette quête de beauté prend des contours variés. Elle s’est densifiée et diversifiée. C’est la beauté du regard que je porte sur les personnes rencontrées et celui qu’elles renvoient quand une inspiration vient éclairer une zone restée dans l’ombre. Beauté de la percée et de la prise de conscience qui libère l’être de ses lourdeurs. Beauté de l’instant “t” où tout peut basculer et transformer l’irréconciliable en éveil, joie et bonté. Beauté de l’émotion qui creuse avec acharnement le cœur et permet l’imprévisible retournement des choses. Beauté du mouvement spontané, élan riant qui irradie nos vies. Beauté du geste qui façonne et imprime une trace unique et vivante, magistrale dans sa limpidité. Beauté du vrai qui se distille à travers les formes (car contenu et formes s’enchevêtrent). Beauté du lien qui réunit une chose et son contraire, et nous unifie et nous réconcilie à travers le reconnaissance de ce qui est, beauté interpellée comme étant vitale, rayonnante et reliante, rappelant les belles expériences vécues et appelant celles à venir… “Pour un chinois, la beauté d’une chose, c’est son essence invisible qui la meut, sa saveur, son parfum et la résonance que ceux-ci engendrent”, écrit François Cheng… We share magic. »
Chaque projet, chaque histoire que j’accompagne est un cheminement pour dérouler un fil rouge, trouver une cohérence et y accrocher une vision. « Trouver le verbe de sa vie », comme le dit si joliment Sarah Roubato dans son inspirante « Lettre à un ado ». Elle vaut pour tous, indéniablement. Ainsi, que le projet qui vous occupe trouve son verbe, lui aussi.
Je vous souhaite une belle et joyeuse année 2017.