L’art du retournement

Que permet la parole libérée ? Comment oser se dire devant ses proches et ceux qu’on aime quand tant de choses sont restées cachées ? Comment montrer sa vulnérabilité ? Dans Midsummer night, une mini-série norvégienne, une famille se réunit pour une fête et des non-dits sont mis à jour. Les cinq épisodes se déclinent ainsi : ruptures et amours, convoitise, jalousie, réconciliation et pardon.

Un jeune homme, sur le point de se marier, a vu sa future femme entrer dans une chambre d’hôtel avec un autre homme. Il est bouleversé et se rend chez ses parents. Il se confie à son père. L’échange qui suit est déroutant et prend à rebrousse-poil le jugement qu’on poserait aisément sur cette situation.

Le fils : Je l’aime tellement. Ça fait vraiment trop mal. J’aurais dû l’appeler et lui dire ce que je pensais. Elle n’a pas le droit de faire ça.
Le père : Un autre homme ?
Le fils : (il acquiesce) J’ignore quoi faire.
Le père : Tu lui as parlé ?
Le fils : Non, je ne l’ai su qu’aujourd’hui. Je ne comprends pas. Tout allait bien, non ?
Le père : C’est quoi, « bien » ?
Le fils : Je suis heureux avec elle, on se correspond.
Le père : C’est beau.
Le fils : Oui, mais plus maintenant.
Le père : Tu veux te battre pour elle ?
Le fils : Je n’ai jamais voulu me battre. Le plan était d’être ensemble et de se faire confiance. Fidélité et respect mutuel.
Le père : C’est quoi, le respect, pour toi ?
Le fils : On apprend ça très tôt, c’est une boussole morale.
Le père : Une boussole morale ?
Le fils : Oui, une boussole morale.
Le père : Es-tu moralement supérieur à elle parce qu’elle est infidèle et que toi tu ne l’es pas ?
Le fils : Non, je ne suis pas supérieur. Mais elle a fait un choix et elle sait que cela me fera du mal. Elle dépasse les bornes.
Le père : Les « bornes » ? Il est plus facile de réduire la morale à des limites que de les respecter.
Le fils : Les limites sont plutôt claires, c’est évident.
Le père : Évident ?
Le fils : Je suis désolé, papa. Je n’ai pas ta force. Je sais ce que tu as traversé et je ne comprends pas comment tu as pardonné tout ça.
Le père : Savoir pardonner quand quelque chose est impardonnable et puis aller de l’avant… Ce n’est pas facile de différencier le bien du mal. Oui, elle t’a blessé. Mais elle a menti, elle a choisi de ne pas te le dire.
Le fils : Elle a menti…
Le père : De peur de te perdre.
Le fils : Eh bien, elle aurait dû y penser plus tôt.
Le père : Probablement. Si c’est un tel choc pour toi, cela pourrait bien être parce que c’est elle qui t’appelle à l’aide. Qui sait ?

Le jeune homme finit par dire à sa future femme qu’il sait son infidélité. La jeune femme s’effondre en larmes, lui explique qu’elle ne sait pas ce qui l’a poussée à faire ça, qu’elle a paniqué, qu’elle a eu peur de de ne pas être à la hauteur, de perdre sa liberté… Le jeune homme repense aux paroles de son père. « Es-tu moralement supérieur à elle parce qu’elle est infidèle et que toi tu ne l’es pas ? Tu veux la punir ? Tu veux la quitter ? Ou vas-tu choisir un autre chemin, plus difficile, en cherchant tout au fond de toi la force de lui pardonner ? Lui pardonner et avancer ? Ce choix t’appartient. Choisis l’homme que tu veux être. »

Elle : (pleurant) Je ne suis qu’une gamine immature et j’ai fait du mal à la personne que j’aime le plus au monde. Je suis sincèrement désolée d’avoir tout gâché.
Lui : Tu me veux ?
Elle : Chéri, je…
Lui : Réponds-moi, tu me veux ?
Elle : Oui.
Lui : Si je tourne la page, tu feras pareil ?
Elle : Oui.
Lui : Alors on devrait toujours se marier. Ça te dit ?
Elle : Oui.
Lui : Tu es sûre de toi ?
Elle : Oui.
Lui : D’accord. Bon, alors marions-nous. Maintenant.
Elle : Maintenant ?
Lui : Oui.

S’ensuit la cérémonie de mariage et l’homme qui officie dit ceci : « Mes chers amis, vous êtes ici pour être unis par le mariage. En vous mariant, vous vous promettez camaraderie et soutien en toutes circonstances, dans les bons et les mauvais moments. Mais ce n’est pas tout. Aimer quelqu’un pour la vie est la promesse la plus difficile qu’on puisse se faire. Vous devez vous fixer des objectifs communs et vous devez également vous consacrer à la réalisation de ces objectifs. Vous connaissant, je ne doute pas que vous y arriverez. Vous serez dévoués. En vous mariant, vous devenez une entité, mais restez deux êtres indépendants et égaux. Il n’y a aucune contradiction entre l’amour et la camaraderie d’un côté, et la liberté et l’indépendance de l’autre. Parce que l’amour, c’est aussi le respect mutuel et apprendre à aimer les défauts de l’autre. »

Savoir changer de perspective

La parole libérée ouvre sur un nouvel horizon. Pardonner l’impardonnable. Ou changer de direction à 180 degrés. Il s’agit d’un véritablement retournement, à l’image de la carte du pendu dans le tarot. Quand je travaille à vos côtés, je suis à l’écoute des tressaillements. Même si j’ai des convictions concernant le contenu à la fois rédactionnel et visuel, je suis capable de suivre le fil ténu d’un work in progress pour laisser advenir les retournements.

C’est dans ces moments fragiles que se produit la magie qui donne toute sa dimension au projet. Tout est dans le processus : le résultat n’est que la trace de ce chemin honnête, délicat, sensible, que nous suivons côte à côte, pour matérialiser votre projet ; lui donner une forme unique, essentielle, calquée sur sa vérité originelle. Concrètement, quand vous vous engagez avec moi dans un projet — et seulement si vous le voulez —, vous vous préparez à suivre un chemin inédit et libérateur qui plonge dans les tréfonds de votre âme et révèle au grand jour sa puissance innée, celle qui est en germe et attend d’être révélée. Car tout projet porte en lui une part de cette vérité qui cherche à transparaître.


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