Plus que la somme de nos peurs
Je reprends ici les mots de Tan Loc Nguyen, directeur de la formation en Psychosynthèse au Centre Source, parce qu’ils me touchent par leurs qualités de douceur et d’ouverture, si chères à la formation qui m’accompagne.
« Qui sommes nous ? Ce que nous vivons, bien sûr. Nous sommes non seulement le vécu des circonstances, mais aussi le vécu subjectif évoluant au rythme des états émotionnels qui conditionnent notre état d’esprit.
Les images aident à appréhender la réalité. Prenons la métaphore de la maison avec ses visiteurs. Un visiteur se présente, vous l’accueillez. Le visiteur est content, il se sent accueilli, puis s’en va. Le visiteur ne s’installe pas dans votre maison, car c’est vous qui habitez et occupez votre espace.
Il en est de même avec les états émotionnels : quand ils se manifestent, vous pouvez les reconnaître comme des visiteurs et les accueillir avec hospitalité. Reconnus comme une source d’énergie, ils peuvent s’en aller.
En période de dépression, de deuil affectif ou professionnel, ce processus se vit intensément. Il ne s’agit pas de vous regarder avec complaisance, mais de laisser vivre pleinement l’énergie vitale qui se présente à vous sous forme de colère, tristesse, inquiétude, peur. En vivant consciemment vos émotions, vous pouvez les sentir se transformer en énergie vitale qui se diffuse dans l’ensemble de votre présence. L’émotion vous enseigne la vitalité. »
Accueillir le ressenti
La métaphore de la maison est également utile pour toute personne très ouverte, qui ne sent pas ses frontières et se laisse aisément deviner au cours d’une rencontre : demandez-vous si vous laissez un visiteur étranger qui vient d’arriver entrer directement dans votre chambre à coucher et fouiller dans vos tiroirs. C’est vous, l’habitant de la maison, qui régulez la venue d’un visiteur par paliers successifs.
Prenez le thé avec chaque émotion qui se présente à votre porte. Quelle que soit cette émotion, un état dépressif, un immense chagrin qui pèse sur votre cœur, une déception ou honte amère, une colère violente, une impuissance morbide, accueillez-la et invitez-la dans votre salon, écoutez-la et vivez-la sans jugement en ressentant vos sensations. Elle s’en ira au moment où votre vitalité s’éveille à nouveau : quelque chose s’est passé, qui correspond à une transformation ou a un changement de conscience, et vous êtes passé dans une autre dimension, un ailleurs qui vous remet en mouvement. L’émotion est comme l’eau qui lave vos pensées et vos représentations pour vous reconnecter au vivant.
En psychosynthèse, le sentiment de choix conscient vous permet d’accueillir les états émotionnels, les vôtres et ceux des autres sans vous identifier à eux. La reconnaissance et l’acceptation consciente sont des seuils qui ouvrent au vécu de l’instant présent, celui de votre vitalité en interrelation avec la vitalité du monde.
Rumi, poète mystique persan (1207-1273) :
L’être humain est une maison d’hôtes.
Chaque matin, un nouvel arrivant.
Une joie, une dépression, une mesquinerie,
une conscience passagère vient, tel un visiteur inattendu.
Accueillez les tous avec entrain.
Même si c’est une foule de chagrins
qui balaye violemment votre maison vide de meubles.
Toujours traitez chaque hôte honorablement.
Il peut vous éclairer vers une nouvelle joie.
Les pensées sombres, la honte, la malice,
allez les accueillir à la porte en riant et invitez-les à rentrer.
Soyez reconnaissants envers ceux qui se présentent
car chacun d’eux vous a été envoyé comme un guide venant d’ailleurs.
Paulo Coelho, écrivain brésilien né en 1947 :
– N’aie jamais honte, dit-il. Accepte ce que la vie t’offre et bois chaque tasse. Tous les vins doivent être goûtés ; certains juste une gorgée, mais pour d’autres, la bouteille entière.
– Oui, mais comment faire la différence ?
– Par le goût. Tu sauras que c’est du bon vin si tu as d’abord goûté au mauvais.